Qu'est-ce que la théorie de la restauration de l'attention (mieux connue en anglais sous l'acronyme ART, Attention Restoration Theory)? Et comment cela peut-il soutenir votre créativité?
Cette théorie suggère que l'exposition à la nature est non seulement agréable, mais peut également nous aider à améliorer notre concentration. La restauration de l'attention repose sur ces bénéfices cognitifs : nettoyer l'esprit du bruit résiduel produit lors des tâches quotidiennes, récupérer de la fatigue attentionnelle, être capable de penser à des problèmes à résoudre et de réfléchir.
Cette théorie a été élaborée par Stephen et Rachel Kaplan à la fin des années 1980 et au début des années 1990, une période caractérisée par des progrès technologiques rapides et des divertissements en salle toujours plus nombreux. Alors que les gens - et en particulier les enfants - passaient de plus en plus de temps à l'intérieur, les préoccupations concernant le manque de temps dans la nature se sont accrues. Bon, ça ne s'est pas amélioré depuis. L'ART gagne en popularité, car plusieurs études viennent corroborer ses résultats.
L'attention, telle qu'elle est généralement comprise, est liée à un ensemble de processus qui nous permettent d'effectuer de nombreuses tâches cognitives telles que la planification, l'analyse, la mémorisation, la résolution de problèmes, la sélection et la synthèse d'informations, etc.
Deux formes d'attention
Rachel et Stephen Kaplan, tous deux chercheurs en psychologie environnementale, ont distingué dans leur théorie de la restauration de l'attention (ART) les 2 formes d'attention suivantes :
L'attention dirigée (également appelée attention « soutenue » ou « volontaire »).
L'attention involontaire (également appelée attention «spontanée» ou «non dirigée»).
L'attention dirigée est une ressource mentale essentielle mais limitée qui nous permet de rester concentrés sur une tâche nécessitant un effort important pendant une longue période, tout en inhibant les stimuli externes ou internes (c'est-à-dire nos pensées). Le truc pour restaurer ses capacités attentionnelles est de recourir à l'attention non dirigée, une espèce d'attention flottante qui se met en branle lors de contacts avec la nature.
Dans son chapitre Nature et restauration psychologique, Barbara Bonnefoy décrit ainsi les environnements propices au déploiement de l'attention involontaire: « Certains environnements, en sollicitant moins les ressources attentionnelles dirigées, auraient un pouvoir restaurateur ou reconstituant et permettraient de reconstruire celles-ci. Pour Kaplan (1995), le contact avec des environnements naturels (parcs naturels, jardins, forêts, plages, parcs urbains, mais aussi plantes vertes sur le rebord d’une fenêtre, vue sur des arbres) est un moyen de rendre temporairement inutile le déploiement de l’attention soutenue, dirigée ou sélective, et donc de lui permettre de prendre du repos. Ces environnements naturels peuvent ainsi contrer le déficit attentionnel, mais sous quatre conditions dans la relation à l’environnement (Kaplan 1995) : la fascination, l'évasion, la cohérence et compatibilité.
La fascination est centrale dans l’ART. Elle renvoie à une forme d’attention qui permet de soutenir son attention sans effort (....) Le caractère fascinant d’un objet ou d’un environnement offre en effet la possibilité à l’individu de reposer son attention soutenue en la remplaçant par une attention qui ne demande aucune concentration particulière. La fascination douce (regarder la neige tomber, les arbres, écouter le chant des oiseaux, sentir des plantes, se sentir connecté à la nature à un espace naturel) est une forme de fascination qui a l’avantage de promouvoir la réflexion tout en favorisant la récupération de l’attention.
L’évasion renvoie à l’éloignement physique ou virtuel des aspects de la vie quotidienne. Cette évasion permet de se sentir ailleurs, de sortir de ses préoccupations, elle libère l’individu de l’activité mentale requérant l’attention soutenue. L’évasion n’est pas nécessairement géographique (même si cet aspect peut en amplifier le sentiment), mais bien psychologique : un simple changement de perspective de la part de l’individu peut permettre l’évasion.
La cohérence se rapporte à l’équilibre entre la facilite ́d’utilisation et la richesse d’un milieu. L’environnement doit en effet être suffisamment riche pour générer de la fascination et offrir la possibilité de contempler, expérimenter ou réfléchir.
Enfin, la compatibilité représente les liens et interactions entre l’environnement et l’individu : un environnement compatible répond aux besoins de l’individu sans lui demander un effort d’attention. L’individu peut effectuer ses actions et accomplir ses buts sans que l’environnement ne l’en empêche.
Ces quatre qualités de la relation à l’environnement sont interdépendantes et s’influencent les unes les autres. Un environnement peut, de plus, répondre à une ou plusieurs de ces propriétés sans être pour autant qualifié de reconstituant.»
Autres contextes, même effet
Fait intéressant, vous n'avez même pas à partir un mois en trekking pour vous restaurer. Simplement regarder des arbres par la fenêtre, écouter des enregistrements d'oiseaux ou visionner des clips de nature peut vous aider. D'autres études ont démontré que des lieux ressourçants comme les monastères ou les musées apportent des bienfaits similaires.
Prescription de bain de forêt?
Saviez-vous que depuis février, le médecins de quatre provinces (C.B., Manitoba, Saskatchewan, Ontario) au Canada peuvent maintenant vous prescrire un bain de forêt si vous êtes déprimés ou anxieux? Le programme s'appelle PaRx et il conçu conjointement avec Parc Canada.
Et depuis mai, le Québec s'est doté d'un programme similaire, le Prescri-Nature, et vous n'avez même pas besoin de passer par un médecin.
« Après 20 minutes d’exposition à la nature, même si ce n’est que dans un parc entouré de quelques arbres, la fréquence cardiaque, la tension artérielle et le taux de cortisol — l’hormone du stress — diminuent », détaille la Dre Bradette.
«Certains disent que ça pourrait même retarder l’apparition des troubles de démence chez les personnes âgées», ajoute Dre Pétrin-Desrosiers. «Chez les enfants qui ont des TDAH par exemple, une balade de 20 minutes dans un parc peut équivaloir à une dose de Ritalin.» (Source: 24heures)
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